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nature

2024-10-30T11:34:13+01:00

Zamana

Publié par Althéa

Ensemble, nous respirons à des rythmes différents. Mais à force d'éternité, par ma peau écaillée, mes bras étirés, ma toison emmêlée, ma sève profonde, je parviens à ajuster ma vision et percevoir leurs silhouettes. Silhouettes rares et fugitives qui viennet troubler mon décor. Silhouettes vivantes d'un monde sans racines, d'un ciel d'étoiles filantes, d'une mer de bateaux ivres.

Ils avaient été plantés, arrosés et sarclés dans un jardin botanique, jusqu'à ce qu'ils retrouvent la force de leur espèce, que leurs racines s'emparent de leur nouveau sol, et qu'ils aceptent enfin de faire souche dans ce nouveau pays. On les avaient affublés du nom de « Bois noir de Haïti » et on leur avait attribué un rôle : celui d'ombrer les arbres de café. Les hommes les avaient domestiqués comme on modèle une terre d'argile. Ils les avaient soumis à leur volonté. C'était dans l'ordre de leur tempérament... Ces petits êtres hors sol sont de terribles prédateurs : ils vous tuent ou ils vous exploitent. Sans le moindre état d'âme.

Le temps d'une lecture, je me suis enracinée, je suis devenu cet arbre, ce zamana qui sait tout de la vie d'une île, de ses arbres et des hommes qui la peuple.

Il raconte la beauté d'une île, La Martinique, de sa nature.

Planté là par les hommes, il s'étale et apporte son ombre, ses fruits et son bois. Il est bavard et nous fait partager ses discussions avec le tamarinier.

Immobile, il observe et témoigne de la vie de la plantation, de ses habitants et de la frénésie des hommes qui passent à toute vitesse. Il les voit bâtir, planter, s'aimer, se haïr, partir, revenir car bien que sans racines certains d'entre eux sont attachés à cette terre. 

Il raconte les colères de l'île auxquelles il ne peut échapper orages, tempêtes, éruption volcanique mais aussi la violence des hommes, les destructions qu'ils causent. 

C'est un très beau texte poétique d'Emmanuel de Reynal, empreint de sensibilité. L'emploi du créole par petites touche y ajoute une agréable sonorité. 

Une excellente lecture, la découverte d'un arbre exceptionnel avec une postface surprenante.

À lire absolument.

Merci aux éditions L'Hamattan et à Babelio pour cette masse critique.

 

Un long temps s'écoula dans ce triste désert. Un temps silencieux de nécropole. Le volcan avait cessé de cracher ses entrailles. Comme fatigué, il s'était endormi sur un lit de morts. Mais le monde devait renaître sans tarder. Il devait relancer très vite ses bourgeons, quitter les ténèbres et repartir enfin. Alors, les pluies mêlèrent les cendres carbonées à la terre. Les vents chassèrent les poussières. Petit à petit, la nature revint plus belle plus forte. Les fleurs chatoyèrent leur robe afin d'exciter les abeilles. Les arbres exhalèrent des parfums troublants pour affrioler les parages.

Les hommes avancent autant par coups de main que par coups de fouet, par amour et par haine en même temps. Ils marchent en équilibre sur la crète des forces contraires. Et ils ont cette curieuse manie de concevoir leurs grandes aventures sur des envies dérisoires. Ainsi, ce sont les parfums d'une tasse de café, puis le goût suave d'un gâteau qui ont déraciné des peuples entiers, bouleversé leur monde et donné naissance à ce lieu ! Ce haut-lieu du sucre dont j'étais devenu l'arbre de veille.

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2024-10-02T11:02:20+02:00

Seule restait la forêt

Publié par Althéa

Elle répondit immédiatement à Robert, lui décrivit la beauté des bois. Elle avait suspendu du suif dans le cerisier, et ils recevaient la visite de mésanges et de cardinaux. Le soir, une chouette rayée hululait, quand reviens tu. Même les cerfs attendaient semblaient s'attarder davantage, come s'ils attendaient son retour.

Ce livre est une merveille.

Un changement de temporalité, j’ai vécu ma lecture au rythme de la nature.

Quatre cent ans de la vie de quelques familles, d’une maison, d’une forêt et de fantômes.

Une leçon d’humilité pour les hommes qui finalement ont une vie très courte et règnent en maîtres imposants leur volonté à tous ceux qui les approchent.

La cabane sera agrandie, transformée, inoccupée, se délabrera et finira envahie par la nature mais conservera toujours les secrets des habitants.

J’ai beaucoup aimé Osgood et ses merveilles, le peintre amoureux et sa passion pour cette nature qu’il peindra jusqu’à la fin donnant lieu à de très belles descriptions.

Viennent aussi des êtres plus sensibles qui ressentiront les émotions laissées : amour, haine, envie …  cadavres aussi.

Patrick Modiano a écrit : « Je crois qu’on entend encore l’écho [… ] de ceux qui ont disparu. Quelque chose continue de vibrer après leur passage, des ondes de plus en plus faibles, mais que l’on capte si l’on est attentif. […] tous ses échos épars qui flottaient dans l’air se cristallisaient.»

Finalement ce qui disparaît est toujours là sous d’autres formes, la forêt fait face aux hommes et à leurs caprices. Elle change, évolue subit les hommes, les insectes, les changements climatiques mais tient fermement sur ses racines.

C’est une histoire étonnante avec une fin surprenante.

Daniel Mason possède une très belle plume. Le texte est bien documenté, de jolies photographies de l’époque l’agrémentent ainsi que les chants des jumelles Osgood.

« … je suis parvenu à la conclusion générale que celui qui fait du bien à la terre sera protégé, tandis que celui qui la viole subira le plus vif des retours de bâton. »

À lire absolument.

Merci aux éditions Buchet Chastel pour ce service de presse. Cette chronique n’engage que moi.

#Seulerestaitlaforêt #NetGalleyFrance

Quatre toits, dix cheminées, dix-huit pièces, toutes abandonnées sauf trois. Le reste encombré par une vie à glaner. Des lambeaux d'écorce et des touffes flétries de champignons. Des os d'animaux. Des épines de porcs-épics entassées. Des plumeaux gris séchés de gerbes d'or,, des gousses fendues d'asclépiades, des frondes de fougères, des bocaux contenant des spécimens d'insectes.

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