Nous sommes comme des poètes, Naya
- apatrides
Le grand Ghérasim Luca l'a dit bien avant moi : Minez vos nations, crachez sur vos nations.
Lui qui refusait passeport et papiers et qui écrivit avant de se jeter dans la Seine : Il n'y a plus de place pour les poètes dans ce monde.
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« Je suis de ceux, crasseux et basanés, qu’on insulte sitôt qu’ils entrent dans l’enceinte des beaux quartiers.
Gitans, Roms, Tsiganes, chacun nous nomme par son propre venin
- voleurs, menteurs, mendiants. Sur
la langue, sur toutes les langues, la
même hargne, le même dédain. »
Le temps d’une lecture je suis devenue « ceux du lac », j’ai fait parti du clan Serban.
Les Serban sont cinq garçons, une fille, le père. Ils vivent simplement en harmonie avec une nature plutôt rude mais ils savent lire, sont libres et se refusent à vivre en ville dans un ghetto.
Ils n’ont pas grand-chose et sont heureux comme ça. Le peu qu’ils ont le ciel, le soleil, la terre, la nature, leur cabane, leur est repris pour construire une réserve. Bien qu’ils fassent parti de cet écosystème, les voir pourrait déranger la bonne conscience des visiteurs ou leur ouvrir les yeux.
Ainsi ce projet va faire d’eux des assistés, des inadaptés, rattrapés par la civilisation, sa violence, l’alcoolisme, le racisme.
Leur infortune va nous permettre de découvrir de nombreux personnages hauts en couleur qui vont témoigner de leur vie avant et après Ceaucescu.
Une mention spéciale pour Moroï qui part son regard et la confiance dont il fait preuve échappera à la mort plusieurs fois.
Des légendes, du fantastique, des secrets, une promesse tenue, un récit qui nous tient en haleine.
C’est l’occasion de découvrir un autre pan de l’histoire roumaine et de ses souffrances avec les minériades dont j’ignorais tout.
Corinne Royer fait désormais partie de ces autrices dont j’ai envie de lire d’autres romans tant pour le style que pour les sujets abordés.
Un roman qui m’a bouleversée, choquée, indignée et fait réfléchir sur notre monde et ses aberrations.
« Renoncer à la liberté et aux grands espaces, au rythme quiet des saisons inscrit dans la laitance de la lune, à la fierté de ne rien devoir à personne. » Est-ce humain d’en obliger d’autres à subir ce destin ?
Merci aux éditions du Seuil pour ce service de presse. Cette chronique n’engage que moi.
#Ceuxdulac #NetGalleyFrance
Sasho était persuadé que les hommes éloignés de la nature mouraient ainsi, dans une tritesse résignée. La mortelle-même était mortifiée de les prendre de cette manière, en cette enclave de béton où ils avaient vécu comme dans un cercueil déjà clos.